Régulation sur le nouveau génie génétique: Notre Position
En collaboration avec une large alliance d'une soixantaine d'organisations de soutien, le ASGG indique dans une prise de position les lignes rouges à ne pas franchir.
Brochure d'information de Friends of the Earth (2020) sur les risques des sprays à ARN (en anglais)
Le riz doré transgénique peut produire du β-carotène grâce à un gène introduit du maïs (image : Wikimedia Commons).
Le 3 décembre, la NZZ a publié un article détaillé sur une variété de riz génétiquement modifié (GM) appelée Golden Rice (GR), qui est désormais cultivée officiellement pour la première fois aux Philippines pour la consommation humaine. L'article reproche implicitement aux personnes et aux organisations qui critiquent les aliments génétiquement modifiés de faire obstacle à la lutte contre la pauvreté. C'est grâce à l'opposition de ces critiques que "des millions d'enfants ont dû souffrir et mourir au cours de toutes ces années", cite l'inventeur du GR. Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), jusqu'à 500 000 enfants perdent la vue chaque année dans le monde en raison d'une carence en vitamine A. Celle-ci se trouve dans les produits animaux ou, sous forme de β-carotène (un précurseur de la vitamine A), dans les légumes et les fruits. Or, aux Philippines, le régime alimentaire de la population pauvre comprend presque exclusivement du riz blanc, qui contient certes des glucides, mais très peu de micronutriments. Le GR contient du β-carotène. Selon la NZZ, "il y en a tellement qu'un enfant aux Philippines peut couvrir environ la moitié de ses besoins quotidiens en vitamine A par sa consommation normale de riz". Dans le Tages-Anzeiger, il est même question de "suffisamment de provitamine A pour couvrir presque ou entièrement les besoins quotidiens des enfants d'âge préscolaire". Les autorités alimentaires et sanitaires des États-Unis, du Canada, de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande concluent en revanche que le GR ne contient pas assez de β-carotène pour être commercialisé comme céréale nutritive. En outre, la transformation du β-carotène en vitamine A nécessite des graisses. Les enfants qui présentent une carence en vitamine A sont issus de familles pauvres qui ne consomment pas régulièrement de graisses. Il n'est donc pas certain qu'ils puissent absorber efficacement le β-carotène dans le GR. En outre, le β-carotène se dégrade rapidement après la récolte, le stockage et la transformation du GR, de même qu'en présence d'humidité et de températures élevées. Le meilleur moyen de conserver le β-carotène serait de mettre immédiatement le riz sous vide et de le stocker à 4 degrés Celsius. Mais même ces conditions, presque impossibles à mettre en œuvre en Asie du Sud-Est, ne pourraient réduire la dégradation que de 54 %. Une autre partie est perdue lors de la cuisson. La GR semble donc incapable de tenir sa promesse, même après des décennies.
Les dernières enquêtes estiment qu'environ 350 000 espèces d'insectes visitent les fleurs et participent à la pollinisation. Image : Shutterstock
En amont de la COP15 à Montréal, l'ONG française Pollinis, qui milite pour la protection des insectes pollinisateurs, a lancé un appel pour mettre en garde contre les conséquences négatives possibles de l'utilisation des biotechnologies dans l'environnement. Les insectes pollinisateurs sont en effet importants pour la biodiversité, les fonctions de l'écosystème et l'augmentation des rendements. Pour inverser le déclin des populations d'insectes, il faut leur offrir un habitat sûr dans les paysages où l'on pratique l'agriculture, l'élevage et la sylviculture, demande Pollinis.
La dissémination d'organismes, de produits ou de composants obtenus à l'aide de la biotechnologie génétique, tels que les pesticides à base d'ARN interférent (ARNi) et les organismes génétiquement modifiés (OGM), pourrait aggraver les facteurs de stress actuels auxquels les insectes pollinisateurs sont déjà exposés, craignent les signataires : des personnalités de renom dans les domaines de la biologie moléculaire, de la génétique, de l'entomologie et de l'agroécologie, de l'apiculture et de l'environnement.
Actuellement, la législation européenne est la même pour les nouveaux et les anciens organismes génétiquement modifiés (OGM). Celle-ci prévoit une évaluation des risques, un étiquetage clair et la traçabilité des OGM mis sur le marché. Mais la Commission européenne a l'intention d'exclure les OGM produits par de nouvelles techniques de génie génétique (NGV) de la législation actuelle sur les OGM, afin d'obtenir un accès simplifié au marché européen. Si la déréglementation prévue est mise en œuvre, les évaluations des risques, les exigences de traçabilité et d'étiquetage seront supprimées pour environ 95 % de toutes les plantes NGV actuellement en cours de développement. Cela permettrait de résoudre de manière ingénieuse le problème du rejet des aliments OGM par les consommateurs. Car sans déclaration, plus personne ne sait ce que contiennent nos aliments. Les puissantes entreprises de semences et de produits chimiques peuvent donc s'attendre à des bénéfices encore plus importants.
À l’occasion de l’Assemblée des délégués d’automne de Bio Suisse du 16 novembre 2022 à Olten, des spécialistes du secteur bio ont exigé que les nouvelles techniques génétiques soient traitées dans le cadre de la Loi sur le génie génétique. La Fédération veut prendre une décision à ce sujet d’ici au printemps.
Du point de vue de la Commission fédérale d'éthique pour la biotechnologie dans le domaine non humain (CENH), l'agriculture doit contribuer davantage à la réduction des émissions nocives pour le climat que ce que la politique lui impose aujourd'hui. On attribue souvent aux nouveaux procédés de génie génétique un rôle central pour atteindre les objectifs de réduction nécessaires de toute urgence. En revanche, une nette majorité de la CENH estime que le potentiel de ces procédés est trop faible pour contribuer de manière significative à l'adaptation nécessaire de l'agriculture dans le délai restreint imparti. La Suisse s'est engagée dans l'accord de Paris sur le climat à fournir une contribution appropriée à la limitation du réchauffement global. Compte tenu des scénarios de dommages liés au changement climatique, la CENH estime qu'il serait éthiquement inacceptable de ne pas atteindre ces objectifs.
Le 25 juin, le Conseil fédéral a adopté le rapport sur l'orientation future de la politique agricole en Suisse. L'orientation générale vers une agriculture plus durable est en principe à saluer. La SAG conteste toutefois que des solutions techniques rapides puissent ouvrir la voie à la durabilité. Un changement de paradigme vers la durabilité nécessite une analyse approfondie des causes des problèmes actuels de l'agriculture, comme le souligne le rapport dans la perspective de la réduction de l'utilisation des pesticides par les collaborateurs de l'Institut pour l'environnement et les ressources naturelles (IUNR). Dans ce cas, un traitement des symptômes à l'aide d'organismes génétiquement modifiés n'apporte aucun remède, mais ne fait que créer de nouveaux problèmes (p. ex. des pesticides encore plus toxiques).