30.06.2015 | Brevets

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Bien que les lois sur les brevets interdisent le brevetage d’espèces animales, l’Office européen des brevets octroie des brevets sur des animaux en vertu d’une interprétation du droit controversée. Illustration: Clipdealer

L’Office européen des brevets (OEB) a révoqué un brevet de l’entreprise Altor BioScience. Alors que l’entreprise états-unienne avait déjà renoncé antérieurement à déposer un brevet couvrant des chimpanzés génétiquement manipulés, l’OEB a maintenant décidé de révoquer aussi la nouvelle version déposée par l’entreprise, couvrant des rats et des souris. Les éléments déterminants à la base de cette décision sont des déficits qualitatifs du brevet au niveau technique. Pour rappel : en 2013, treize organisations en Allemagne, en Suisse et en Angleterre avaient fait ensemble opposition contre le brevet de l’entreprise états-unienne Altor BioScience couvrant des primates, et en particulier des chimpanzés

dont le génome est manipulé avec des gènes humains. Les animaux devaient servir d’usines vivantes pour la production d’anticorps humains. Les organisations recourantes étaient la fondation Albert Schweitzer Stiftung für unsere Mitwelt, le Deutscher Tierschutzbund, le Gen-ethisches Netzwerk (GeN), GeneWatch UK, la Gesellschaft für ökologische Forschung, l’Institut Jane Goodall, Kein Patent auf Leben!, Menschen für Tierrechte, Pro Wildlife, le Schweizerische Arbeitsgruppe Gentechnologie (SAG), la Protection Suisse des Animaux (PSA), Testbiotech et Wild Chimpanzee Foundation Deutschland (WCF).

De 2012 à 2014, plusieurs organisations ont déposé quatre recours en tout contre des brevets européens sur des chimpanzés génétiquement modifiés, suscitant des réactions variées de la part des entreprises concernées : il y a quelques mois déjà, Bionomics, une entreprise australienne, a annoncé qu’elle renonçait à ses prétentions sur des animaux génétiquement modifiés. Par contre, l’entreprise Intrexon, qui détient deux brevets européens sur des grands singes manipulés avec de l’ADN d’insectes, veut maintenir ses brevets. L’audition relative aux recours contre les brevets d’Intrexon aura lieu le 29 septembre à La Hague.

« Les brevets sur les grands singes au génome manipulé sont un affront à la dignité de l’être humain et de l’animal. La révocation du brevet d’Altor BioScience est en l‘occurrence un succès important », conclut Christoph Then pour les recourants. « Car même les brevets sur les rats et les souris ne peuvent se justifier ni par des raisons médicales, ni sur le plan éthique. La production de médicaments ne donne pas, et de loin, le droit de breveter des animaux comme inventions ». Testbiotech a publié récemment un rapport montrant qu’un marché juteux s’est développé autour des animaux de laboratoire génétiquement modifiés brevetés, marché qui contribue à faire augmenter le nombre d’expériences sur les animaux. Pour mettre un terme aux profits réalisés avec la souffrance animale, Testbiotech demande notamment aux banques qui investissent dans l’industrie pharmaceutique d’adhérer à des normes claires pour des investissements éthiques. « Le domaine des manipulations génétiques pratiquées sur les animaux est précisément la raison principale de l’augmentation continue du nombre d’animaux utilisés à des fins d’expérimentation animale. Au lieu d’encourager ce développement regrettable avec des brevets, il faudrait investir dans une recherche moderne, éthiquement responsable, sans expérimentation animale », insiste le Dr Brigitte Rusche, vice-présidente du Deutscher Tierschutzbund et cheffe de l’Akademie für Tierschutz.

En Suisse aussi, le nombre d’animaux d’expérimentation est à nouveau en augmentation. En 2014, 606 505 animaux ont été utilisés dans des essais, 2,8 % plus que l’année précédente. Il s’agissait pour la plupart de rongeurs (78,8%), le nombre de souris génétiquement modifiées affichant globalement une progression de 5,7%.

• PDF: Rapport sur le marché lucratif avec les animaux génétiquement modifiés (Testbiotech, en allemand)
• Lien externe: Expérimentation animale en 2014 : légère hausse du nombre d’animaux utilisés